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La Bourse-Livet
© Fonds C.B
La Bourse- Livet par Alfred Gernoux
Le Réveil Syndicaliste. 1er Février 1938
© Fonds G.Lecomte
Je ne passe jamais devant la Bourse du Travail bien située au centre de l’arrière- région de la Fosse sans penser à l’École LIVET, qui occupa cet emplacement pendant un demi-siècle.
Étrange destinée, c’est là qu’un petit Maît’ d’école de l’Anjou, ayant enseigné à la Pouëze et à Saint Mathurin sur Loire, où il avait connu tous les déboires du magister-greffier, vint planter sa tente en 1846 au moment où le machinisme grandissant demandait des ouvriers éclairés. C’est là qu’aujourd’hui, la même classe de travailleurs vient puiser ses directives, et parfois des consolations.
Je revois le père « Livet », parcourant chaque jour, à grandes enjambées, tout cet enclos où il avait réuni d’abord 50 élèves, et où il en laissa 500, et quels Élèves ! Les futurs dirigeants et agents actifs de toutes les usines de la région. De ce centre dynamique est parti l’essor de NANTES LA GRANDE.
Une idée nette en cet homme de foi, fils du Peuple : délaisser le latin et le grec, tout ce qui restait de la vieille scolastique, pour créer l’enseignement professionnel, former des hommes pratiques, des réalisateurs.
Il s’endetta pour acheter le terrain qui porte actuellement Le Temple du Travail et avec l’audace d’un prophète, il dit : j’aurai des étaux, des établis, des outils modernes, là je formerai de bons ouvriers, j’aurai une machine à vapeur, une vraie.
Cet illuminé était aussi un grand cœur. Sans l’amour qui rayonna de ce demi-hectare de terrain pour s’en aller vers les élèves, les familles, les autorités, les amis, le peuple, jamais le bon père LIVET n’aurait été le créateur de l’enseignement professionnel, auquel son nom reste attaché en FRANCE comme à l’ETRANGER.
Certains espaces sont un pôle magnétique, l’ancienne école LIVET, la Bourse actuelle, le prouvent.
Lorsque le père LIVET, prit sa retraite, il ne put s’éloigner de ses classes, de ses ateliers, où il avait donné tout le meilleur de lui-même, où il avait au point de vue conscience professionnelle et pratique, formé de bonnes promotions d’ingénieurs et sous-ingénieurs du travail. Il se plut à occuper un modeste appartement sur la place qui porte aujourd’hui son nom, au dessus du bureau de tabac et de la boîte aux lettres du quartier.
C’est là, que la popularité, la gloire, vinrent prendre le vieillard par le bras, et lui prouver que les Nantais savent être reconnaissants. Depuis le Docteur GUÉPIN, aucune autre notabilité n’ était entrée aussi haut dans la légende.
C’est vers les jeunes gens qu’allait surtout les affections du père LIVET. Il était joyeux d’assister aux réunions de la Ligue de l’Enseignement, heureux d’entrer dans les modestes écoles publiques de la Ville et de bavarder avec les petits. Sa grande joie était d’assister aux distributions de prix, et d’en suivre le palmarès. Discrètement, il aidait les élèves pauvres bien doués.
Oh ! Il n’avait pas oublié ses grands ennuis d’autrefois, alors qu’il était petit maît’ d’école en Anjou, jeune Directeur de la pension à Nantes ; toutes ses peines de famille et ses lourds soucis d’argent. Il n’oubliait pas toutes ses heures de cours, ni toutes ses veilles. Ne l’avait-on pas traité de fou, d’ignorant, de franc maçon, de révolutionnaire ! N’avait-il pas fallu la plume autorisée de Frédéric PASSY, le grand pacifiste de l’époque ; n’avait-il pas fallu le séjour, dans l’École même, du « Congrès des sciences savantes en 1877 » pour qu’on reconnût et approuvât l’orientation nouvelle donnée à l’enseignement ?
Aussi, lorsqu’on le rencontrait dans la rue, dans le tramway, on était prévenant et plein d’égards pour le « père LIVET ». Il ouvrait toujours de grands yeux étonnés ! Il devait se revoir toujours luttant avec ardeur et énergie au milieu de ses classes et ateliers, dans cet enclos de la Bourse que sa haute silhouette avait fini par dominer.
« Père LIVET », école professionnelle, fêtes musicales et chorégraphiques avec la « Livétienne », expositions de travaux d’élèves... ; Bourse du Travail, bureaux de PENEAU, de ses devanciers et de leurs collaborateurs, salles de réunions, cours, conférences, scènes théâtrales, bibliothèque, le présent journal, etc, etc...c’est toute la poésie de l’avenir entourant une création virile, indomptable, fertile, tenace, qui ne faillit jamais devant les forces de la réaction, que je sens autour de ces deux mots : BOURSE-LIVET.
Note : Le 28 juillet 1911, le conseil municipal vote l’acquisition des bâtiments de l’ancienne école professionnelle Livet, situés rue Sainte-Marie (actuelle rue Désiré-Colombe) et la construction d’un nouvel immeuble rue Arsène-Leloup. Le chantier est brutalement stoppé par la guerre. L’emménagement de la bourse ne survient qu’au mois de février 1921 et l’ensemble n’est inauguré qu’en 1924.
Christophe Belser. Nantes au quotidien. Avril 2009.
© Archives lycée Livet
© Fonds C.B
© Archives lycée Livet
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